CHARLIE CHRISTIAN – SA VIE ET SON OEUVRE
Charlie Christian fut une étoile filante de l’Histoire du jazz. Il fut la première figure importante de la guitare jazz grâce à l’arrivée et l’utilisation de la guitare électrique. Il fut un des pionniers du nouveau style au côté de Charlie Parker, le Bebop…
Charlie Christian et l’avènement des guitares amplifiées
Etouffé par le souffle combiné d’une douzaine de souffleurs, épaulé et écrasé par de lourds batteurs et d’agressifs pianistes, le guitariste donne l’impression d’avoir livré à l’époque des grands orchestres une bataille perdue d’avance. L’idée d’une guitare amplifiée ou électrique était dans l’air dès les années 20. En 1924 Gibson présenta même ses premiers instruments aux musiciens mais la réaction fut négative.
L’un des premiers jazzmen à jouer de la guitare électrique fut Eddie Durham qui se fit connaître dans les meilleurs orchestres de Kansas City notamment dans celui de Benny Moten. Eddie se souvient de ses premières expériences de guitariste solo avec les grands orchestres : « Les orchestres vous écrase vous savez ; j’ai donc pris la guitare sèche et suis allé jusqu’au micro et je l’ai mis directement dans le trou de la guitare pour que l’on entende. Je ne pense que quelqu’un ait fait ça avant. ». Durham ne fut cependant pas le premier à enregistrer avec une guitare électrique. Cet honneur revint à George Barnes (1921-1977).
Lentement, le son à la mode de la guitare électrique devint familier au public. Mais celui qui porterait l’instrument en pleine lumière était toujours attendu. La guitare avait besoin d’une figure charismatique pour lui donner une vie authentique dans le jazz. Et ce fut un jeune musicien noir, boutonneux et d’aspect fragile nommé Charlie Christian qui devint le pionnier de la guitare électrique jazz.
CHARLIE CHRISTIAN : SA CARRIÈRE FULGURANTE
Né en 1916 à Dallas, Charlie Christian fut élevé à Oklahoma City. Oklahoma, avec le Missouri, le Kansas, l’Arkansas et le Texas, faisait partie du pays du blues. Le père de Charlie forma un quartette itinérant avec ses trois fils avec lui et Charlie à la guitare, Edward à la contrebasse et Clarence au violon et à la mandoline. Dans la tradition des formations à cordes rurales, ils arpentaient les rues et jouaient un répertoire de blues, opéra et ballades.
En 1936, au Roseland Ballroom de Kansas City, le jeune Christian confirma sa réputation naissante en surclassant les trois guitaristes les plus expérimentés et talentueux de la ville dont Eddie Durham. Contrairement à la plupart des guitaristes qui redoutaient la guitare électrique et ne voyait en elle qu’une invention bâtarde, Charlie en expérimentait toutes les possibilités. Non seulement elle était plus puissante, mais la tenue des notes était bien plus importante, plus proche d’un instrument à vent.
En 1939, il fut engagé par Benny Goodman. La situation de Christian changea de manière extraordinaire. Son salaire augmenta de 2000%; il passa du niveau de pauvreté 7,5 $ à Oklahoma à 150$ par semaine avec Goodman. Christian était la star de l’orchestre. Cependant, lorsqu’ils arrivèrent à New York, il dût aller vivre à Harlem à cause de la couleur de sa peau. Et là comme le souligne le producteur Hammond : «c’est là qu’il devait creuser sa tombe ». Avec sa célébrité naissante, Charlie devint une sorte de play- boy « after-hours » et sa vie une succession de jam sessions, de beuveries, de majiruana et de femmes. Le premier enregistrement n’eut pas lieu avec son patron mais avec Lionel Hampton.
CHARLIE CHRISTIAN : PIONNIER DU BEBOP
Au milieu des années 40, l’ancien chef Teddy Hill prit en charge la direction du Minton’s Play House, endroit petit, intime, qui devint le lieu des jams-sessions. Charlie Christian s’y rendait très souvent et côtoyait ainsi Dizzy Gillespie, Thelonius Monk, Kenny Clarke et fût un de pionniers du nouveau jazz appelé bebop. Son incessante activité, musicale et autre commença à avoir des effets sur la fragile santé de Christian. Il contracta une pneumonie et décéda le 2 mars 1942 sans avoir put récolter les fruits de ses efforts lorsque le monde découvrit le bop. Ce qui est certain, c’est que le jazz perdait sa figure la plus révolutionnaire en matière de guitare.
L’HÉRITAGE DE CHARLIE CHRISTIAN
Il est stupéfiant de réaliser tout ce que fit Charlie Christian en si peu de temps. En moins de deux ans, d’août 1939 à juin 1941, il bouleversa le monde du jazz. Pour la seule guitare, il libéra de nombreux bons musiciens de l’esclavage et des frustrations du jeu essentiellement rythmique. Il fit accepter l’instrument amplifié dans le jazz et le blues. Musicalement, sa manière d’utiliser de longues phrases, commençant et finissant à des endroits inhabituels, mais toujours avec leurs racines dans le blues, indiqua la voix du bop.
D’un point de vue guitaristique, la seule critique possible serait son insistance sur l’aspect linéaire, mélodique de l’instrument. Son style inspiré des saxophonistes et notamment Lester Young qu’il admirait, tendait à négliger la possibilité du jeu en accords. Et son influence fût telle que la génération suivante eut tendance également à négliger cet aspect.
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